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Charges déductibles en droit fiscal et preuve : la jurisprudence Ministre c/ Société Sylvain Joyeux (21 mai 2007)

Conseil d'État - N° 284719 - Publiée au recueil Lebon

 

Cette décision a marqué une inflexion très importante dans la jurisprudence relative à la charge de la preuve en contentieux fiscal. En voici les principaux extraits, qui illustrent le retour à un système ternaire en matière d'administration de la preuve.

 

"Considérant ... que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

 

Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

 

Considérant que la société Sylvain Joyeux, en produisant les factures régulièrement émises par les sociétés Sicopar et Socopap, et honorées par elle, établit, sans être utilement contredite par le ministre, la correction de l'inscription de ces charges en comptabilité ainsi que la valeur de ses justifications eu égard notamment au caractère immatériel des prestations effectuées ; que, pour regarder les prestations facturées comme ne correspondant à aucune prestation effectivement réalisée, l'administration se borne à soutenir que la société Sylvain Joyeux n'a présenté lors du contrôle sur place aucune pièce susceptible de justifier de la réalité et de la nature des interventions des sociétés Sicopar et Socopap, pour des missions d'assistance et de conseil dans l'organisation et la constitution de dossiers de soumission aux marchés publics, qui devaient nécessairement, selon elle, conduire à un échange de courriers avec la société afin de transmettre tous les renseignements indispensables à la conclusion du contrat ; que ce faisant, l'administration ne peut être regardée comme ayant produit des éléments de nature à laisser penser que ces versements constituaient de pures libéralités consenties dans un intérêt autre que celui de l'entreprise ".

 

(1) Dr. fisc. 2007, n° 46, comm. 970, note Ch. de la Mardière ; RJF 8-9/2007, n° 953, chron. O. Fouquet, p. 631 ; BDCF 8-9/2007, n° 102, concl. E. Glaser.

 

 

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